AUTOPORTRAIT
1985, automne.
Excellentes vendanges à Fox-Amphoux.
Quand j’ai appris mon admission à l’Université de Provence -section photographie- les mains encore noires de tanins je suis partie toutes affaires cessantes à l’abordage d’un savoir et de techniques encore mystérieux.
Je dois à Fernand Léger -cet inconnu- d’avoir été recalée à l’ENP d’Arles. Pour une ex-étudiante en économie, cela n’allait pas de soi.
A Montpellier, nous formons un cercle de fervents chercheurs en photographie, nous écumons les alentours, rassemblés par les nécessités du métier, le laboratoire partagé, les heures où il faut absolument aller pêcher l’extravagance de la lumière.
L’on était disposé à se tenir fructueusement compagnie.
Dans le petit labo donnant sur le jardin, un de ces comparses construit pour moi des machines volantes. Le petit fil de fer au bout duquel on fixe une pastille de papier noir prend des airs de voltigeur et le papier identique percé d’un trou fonction de tapis volant.
Je découvre le modelage… c’est à dire j’entreprends de faire des tirages, de vrais tirages de mes photographies. Avec ces papillons de papier tournoyant sous la lumière dans la caverne feutrée du laboratoire, j’ai beaucoup voyagé.
Oui, j’ai bien voyagé.
Paris 1988, Jean-Yves Brégand, grand maître du tirage, y fait de moi son apprentie.
Paris a été mon école des Beaux-Arts internationale. Les ateliers d’artistes des Frigos à Paris 13ème, ma résidence.
Les photographes me confient le « pétrissage » de leurs précieux négatifs, j’ai apprivoisé mes papillons noirs et mes mains sont devenues dresseuses d’ombres chinoises. Merci Pierre Amrouche ! Tu me nommes joliment « la fée des négatifs ».
Des feuilles argentées s’amoncellent…